Etre Arabe

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Après être Romains et être Grecs, être Arabe s’imposait. La naissance de la religion musulmane et la conquête puis la défaite arabe en Méditerranée, a scindé notre monde méditerranéen en deux : la rive nord judéo-chrétienne et la rive sud arabo-musulmane.

MAIS QU’EST CE QUE LE MONDE ARABE ?

Une région ou un groupe de pays, située entre le Maghreb, la péninsule arabique, l’Irak et la Syrie ; ou l’on parle majoritairement l’Arabe, dont l’alimentation est Méditerranéenne, un peuple fondé par la prégnance de la religion musulmane ?
Mais les arabes existaient avant l’Islam, même s’il ne remonte pas à la très haute antiquité. Le terme arabe se retrouve dans les annales Assyriennes en 853 AvJC. Le livre de Jérémie parle des Rois d’Arabie qui habitent dans le désert ; c’étaient des nomades vivant de l’élevage, de moutons, d’ânes, de bovins et surtout de dromadaires utilisés comme montures pour les soldats et comme animaux de bât dans les caravanes.
Les Grecs et les Romains distingueront l’Arabie pétreuse faite de pierre (Petra), l’Arabie « déserte » faite de sable, et l’Arabie « heureuse » verdoyante, enrichie par le commerce des matières aromatiques comme l’encens, correspondant au YEMEN, au royaume de la reine de Saba, contemporaine de Salomon, bien connue des archéologues avec pour capitale, MARIB, ou l’on a retrouvé un temple vieux de plus de 3000 ans.

Au Louvre, est conservée une pierre tombale datant de 328 de notre ère, provenant du sud de la Syrie, ou un certain Imrou Al Qays se proclame roi de tous les arabes. L’inscription est en alphabet Nabathéen. L’alphabet arabe moderne n’apparaitra que 3 siècle plus tard au VI ème siècle.

Au VI ème siècle, dans la région, il y avait différents royaumes d’habitants sédentaires, qui ont été sous la suzeraineté des souverains d’Ethiopie ou était promu le Christianisme.

Le VII ème siècle est une période charnière dans la région, fait de troubles politiques et de dérèglement climatique, liés à une éruption volcanique. Jusqu’à une période récente, les sociétés étaient essentiellement agraires, et qui dit crise climatique (froid ou sécheresse) dit crise alimentaire et sociale dans toute la région. La crise climatique ne fera ni chaud ni froid aux troupes arabes, venant du désert. Elles vont conquérir en quelques batailles : la Syrie, l’irak, et L’Egypte, plus difficilement le Maghreb, l’Espagne, et l’Asie centrale.

Parmi les tribus arabes, celle de Qouraysh, règne sur la Mecque, centre caravanier mais aussi lieu sacré ou l’on a retrouvé un sanctuaire datant du II ème siècle ou se rendaient en pèlerinage des adeptes de cultes polythéistes mais aussi des chrétiens, comme l’atteste les fresques byzantines côtoyant les divinités païennes.
La Mecque a vu naitre la religion musulmane dont nous avons vu les origines judéo-nazaréennes avec notre VM Mounir. Mohammad, orphelin très jeune, appartenant au clan de maitres puissants de la Mecque, épouse à 40 ans une riche veuve, il exerce le métier de caravanier, il reçoit dans la grotte de Hira, la parole de dieu par l’Archange Gabriel, il commence à prêcher. Comme tous les prêcheur à succès qui dérange l’ordre établi, il est vite obligé de s’exiler à Médine. Il y côtoie des juifs, organise politiquement la communauté musulmane, devient chef de guerre et crée un embryon d’état, avant de revenir à la Mecque ou il mourra en 630. Le prophète a largement emprunté à la mythologie du judaïsme et du christianisme (Ibrahim, Myriam, la révélation, l’archange Gabriel … Isa, le fils de Myriam, cité 93 fois dans le Coran) et la religion musulmane s’est également largement inspirée de la philosophie d’Aristote. Mais les arabes, les peuples du désert, qui ont bénéficié des traductions des grecs et des latins, faites à Alexandrie par des arabes chrétiens, n’ont retenu que ce qui confirmait leur propre identité et tradition.
Les arabes avaient également la certitude de la supériorité de la langue arabe, c’est pourquoi ils l’ont imposé à tous les peuples et territoires conquis. Le développement de l’écriture moderne arabe a été concomitante de la diffusion de la pensée musulmane au VI ème et VII ème siècle.

La religion musulmane s’est développée dans un contexte politique d’expansion territoriale et un système politique, l’Islam, qui s’exprime pleinement dans un sultanat (roi ou empereur, à ne pas confondre avec le calife, successeur du prophète), gouverné par les principes de la charia et les textes sacrés du Coran. L’Islam, à l’époque est apparu comme libérateur car n’obligeant pas à la conversion, respectant la diversité religieuse (respectant les juifs et les chrétiens), avec un système social moins rigide que les empires antiques.

Les grandes religions ont toujours été au départ un projet politique. L’expansion territoriale oblige le califat à se structurer pour gérer l’empire arabe. Les quatre premiers détenteurs du pouvoir sont désignés par élection. En dehors du premier calife (qui mettra par écrit les paroles du prophète dans le Coran), les trois autres, les califes maudits, seront assassinés, on parle de la malédiction de Fatima, la fille de Mohammed qui avait été écarté de la succession. Après de violentes batailles, les conflits internes divisent la communauté en deux grands courants, sunnite et shiite.

Les vainqueurs, la famille Omeyaddes, met en place une dynastie héréditaire, se coulant dans le moule administratif et culturel Byzantin puis la seconde dynastie de l’Islam, celle des Abassides en 750 s’organise dans deux grandes capitales, Bagdad et Samara. Sous le règne Abassides, dans les « maisons de la sagesse », médecins, astronomes, religieux, philosophes se côtoient et participent à une civilisation brillante nourrie de la pensée grecque et persane. Le IX ème et X siècle sont considérés comme l’âge d’or pour le monde islamique. Des dynasties rivales naissent en Egypte (les Fatimides), au Maroc (se succèdent Idrisse, Almoravide, Almohade, Mérinide, Saadienne, Alaouite), alors qu’en Espagne les Omeyyades, correspondent à Al Andalus.
Plusieurs vagues d’invasion vont mettre à mal ce pouvoir, les Seljoukides (ancêtres des turcs), nomades venus des steppes Kirghizes, qui vont ouvrir la voie aux mongols. Ils prennent Bagdad, le calife arabe n’aura plus que des pouvoirs religieux, puis il envahissent l’Arménie dans une écrasante victoire sur les byzantins en 1071 et fondent le sultanat de RUM (dérivé de ROME). Une des capitales de l’Empire sera RAY (Téhéran). Fini les maisons de la sagesse qui sont transformées en Madrassa ; les intellectuels, les lettrés grecs et les savants sont chassés et partirons à l’ouest contribuant à la renaissance florentine. Les navigateurs portugais, Vasco de Gama en tête, vont être incités à contourner le moyen orient, et Christophe Collomb à trouver une nouvelle route vers les Indes.
Le pâpe Urban II lance la première croisade car les Seljoukides empêchaient les pèlerins venus d’occident d’aller à Jérusalem, ce qui sauve momentanément l’empire byzantin et la chrétienté (nous sommes en 1095-99), La croisade aboutira à la création du royaume chrétien de Jérusalem.

Puis ce sont les turcs dits ottomans car dirigés par Osman, arrivés aussi de la steppe, poussés par les Mongols. Ils déferlent sur l’Anatolie byzantine (Nicée), et sur Bagdad, suivis ensuite par les Mongols (héritiers de Gengis Khan) qui prennent à leur tour Bagdad en 1258. Les arabes sortent alors de l’Histoire par l’invasion asiatique et non par les croisades occidentales.

L’Empire Mongol sera le plus grand des empires, s’étendant de la chine à l’Europe. On en retient surtout les techniques de guerre et la cruauté (des millions de morts). L’invention de l’étrier leur permet de chevaucher tout en tirant à l’arc, l’équipement de protection est léger (lanières de cuir recouvertes de métal), la rapidité est fulgurante (en moyenne 130 km par jour, 4 à 5 chevaux par cavalier). On leur doit la diffusion de la poudre à canon importée de chine (rappelons que Pékin a été fondée par les Mongols), les flèches explosives, la poudre de lait (clé d’une autonomie extraordinaire). On doit aussi à l’empire Mongol la sécurisation des routes de la soie et du commerce en Asie, permis par la pax Mongolica, dont a été témoin le marchand Vénitien Marco Polo (le dévisement du monde). Les Ouighours, de langue turc, musulmans au nord de la chine sont les derniers témoins de la conquête arabe en Asie en 751 et des échanges avec brassage de la population entre le monde européen, islamique et chinois dans l’empire Mongol. Dans l’histoire récente, ils ont refusé de combattre les puissances étrangères et de s’impliquer dans la révolte des boxers. Constituants une épine dans la réunification de l’empire du milieu, après les défaites au début du siècle, contre le Japon et les humiliations de la « guerre de l’opium », Ils sont actuellement réprimés par le régime chinois.

En 1353, les Ottomans traversent le détroit du Bosphore et marque l’histoire. Ils échoueront par deux fois à prendre Vienne. Le monde arabe, en déclin, est alors dominé par l’empire ottomans. Commence cette période dit du sommeil islamique, alors que le monde change avec la découverte de l’Amérique. Ce n’est qu’avec la première guerre mondiale que l’empire ottoman explosera (Laurence d’Arabie).

L’islam qui avait conquit une bonne partie du bassin méditerranéen, pas en douceur, mais à coup de razzia, a été expulsé avec les juifs du territoire de l’Europe occidentale, physiquement, politiquement mais surtout expulsé de la pensée européenne.
On sait pourtant le rôle qu’a jouer l’Espagne judéo-arabe (Averroes et Maimonides) non seulement dans la transmission, mais la relecture de la philosophie grecque, préparant le terrain, a une certaine laïcité, en instituant la séparation fondatrice de modernité, entre la raison et la foi, entre théologie et philosophie.
L’expulsion des juifs et des musulmans d’Espagne marque la naissance de l’occident en 1492, année de la découverte de l’Amérique et du nouveau monde.
La tradition musulmane parle de l’époque qui précède la naissance du prophète vers 530 ApJC, comme de « l’époque de l’ignorance », et bien, les humanistes du 16 ème siècle vont s’inventer un passé rejetant tout ce qui est supposé n’être ni gréco-romain, ni chrétien, faisant fi de la naissance de la troisième religion monothéiste abrahamique au VII siècle : effacées, les influences babyloniennes, chaldéenne, égyptiennes, qui ont irrigués la Grèce et fait la pluralité de l’empire romain, éliminées les sources orientales judéo-musulmane.
En 1535, après l’expulsion des juifs, de ce qui fut Al Andalous, le paradis perdu pour les arabes, on passe de l’enfermement religieux à l’exclusion raciale, en inventant la notion de la « limpieza del sangre », oú pour obtenir un emploi public on doit prouver n’avoir aucun membre de la famille juif ou musulman depuis 4 générations.

La chrétienté, le développement économique de l’Occident, donnera le sentiment de la supériorité de la race blanche, plaçant les Européens au sommet de l’échelle des civilisations. Cette suprématie occidentale va légitimer ce qui va suivre dans le nouveau monde et dans les colonies.

L’Europe par le développement du commerce à partir de la renaissance (avec une main d’œuvre bon marché : les esclaves dans les colonies et les ouvriers misérables sur le continent), engagée dans la révolution industrielle dès la moitié du 18ème siècle, étend sa puissance. Français et Anglais colonisent notamment le Maghreb. Le monde arabe ne retrouvera son autonomie relative qu’au XX siècle par des guerres d’indépendances à la suite de la 2ème guerre mondiale.
De nouveaux enjeux apparaissent, les richesses minières, le pétrole, l’état juif en terre sainte, l’impérialisme de deux blocs, l’URSS et les USA, soutenant des régimes autocrates nationalistes. Les tentatives de panarabisme n’auront aucun succès et l’on assiste à la montée de l’Islamisme avec la mondialisation, la révolution numérique, les changements climatiques et migratoires, sans parler de la « cancel culture ».

Le moyen orient reste ce monde « compliqué » et la méditerranée redevient un cimetière marin, une mer séparant deux mondes qui s’affrontent : le monde occidental et le monde arabo – islamique, dont les traditions se sont réduites à la religion avec une sacralisation du passé, contre un occident qui sera symbole de modernité, mais qu’il faut combattre pour éviter toute dissolution, d’autant qu’elle est considérée comme dépravée et décadente.

Ce rappel historique montre à quel point, il est difficile de définir une identité arabe, simplement par la langue, ou par la religion ou par le mode de vie. Rappelez vous ce poète syrien qui était tout sauf arabe, l’élite tunisienne qui se prétend uniquement héritière des phéniciens et de Carthage, les turcs venus des steppes, musulmans dont l’alphabet est cyrillique, les marocains qui sont des berbères, des amazighes (hommes libres, autochtones, comme les Maures, les Numides…) encore méprisés par les arabes de la péninsule.
De même, lorsque l’on regarde les blogs des français d’origines maghrébines, à la question « êtes vous arabes », les réponses sont d’une extrême diversité, très peu se revendiquent « arabe ».
Plus qu’un autre, le monde arabe, voire le monde arabophone, n’est en fait qu’une grande mosaïque, en proie à des conflits permanents du fait de son hétérogénéité, ou l’on ne peut raisonnablement qu’étudier des différences de chacune des composantes, en évitant toute généralisation.

J’ai dit

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